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Dans le cadre de la troisième édition des « Scènes arabes : rencontres universitaires autour des arts du spectacle dans le monde arabe » qui sera consacrée aux « Transformations et mutations dans les arts du spectacle arabes : état des lieux » , sera organisé un colloque international qui se déroulera du 15 au 16 novembre 2021 à l’université Bordeaux Montaigne.
L’implantation du théâtre, dans sa forme occidentale, dans le monde arabe vers la fin du XIXe siècle, affectera de manière radicale l’ensemble des arts spectaculaires traditionnels en imposant de nouvelles formes, de nouveaux espaces et de nouvelles modalités de jeu. Durant plusieurs décennies, allant de la fin du XIXe siècle jusqu’aux années 1930, cette nouvelle forme d’expression que les pionniers adapteront au goût du public arabe local, prendra essentiellement la forme de spectacles divertissants alliant musique et scènes comiques. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que les plus grandes stars arabes de cette époque-là ont été soit des chanteurs soit des danseurs à l’image de Salam Hijazi, Mounira al Mahdiya…
Il fallait attendre les années 1930 pour que l’écriture théâtrale en tant que production textuelle respectant les normes classiques de la composition dramatique, destinée soit à la lecture soit à la scène, soit reconnue comme pratique « respectable ». Le théâtre arabe connaît l’un de ses grands tournants ou mutations grâce, aux écrits d’un certain nombre d’hommes de lettres arabes jouissant d’une grande notoriété comme Tawfiq al Hakim, Gabran Khalil Gabran, Taha Hussein, qui ont fait entrer la composition dramatique dans le domaine de la littérature, lui donnant ainsi ses lettres de noblesse.
Pendant longtemps, que soit par le biais de la traduction et de l’adaptation, ou au travers de l’imitation, les créations théâtres arabes ont été des copies d’œuvres européennes. Ce n’est qu’à partir des années 1950-60, période d’une grande instabilité et qui connaîtra plusieurs événements qui changeront le cours de la quasi-totalité des pays arabes, que la scène théâtrale arabe va connaître une nouvelle tendance que certains ont qualifié de « théâtre du patrimoine ». Les promoteurs de cette nouvelle esthétique vont essayer de donner au théâtre arabe une certaine authenticité. Une quête qui va se décliner de différentes formes et courants selon la sensibilité et les visées esthétiques et politiques de chaque artiste. Ce qui est surtout notable c’est que cette recherche donnera de nouvelles formes d’écritures et de nouvelles esthétiques avec lesquels les auteurs arabes essaieront de dépasser le modèle occidental. Ces tentatives donneront des textes d’une grande qualité littéraire et dramatique dont certains sont aujourd’hui considérés comme des classiques voire des chefs-d’œuvre du répertoire arabe comme al Mejdoub, al Harraz ou al-maqamat du marocain Tayeb Saddiki, La tête du Mamlouk Jaber, … du syrien Saad Allah Wannous, al-Farafîr (Les Scapins) de l’égyptien Youssef Idriss, Lejouad de l’Algérien Abdelkader Alloula, La révolte des nègres ou Risalat al Ghofrane du tunisien Azzedin Madani, etc. Ce mouvement a aussi été accompagné d’un grand effort de théorisation qui a donné lieu à plusieurs manifestes comme ceux du théâtre de politisation de Saadallah Wannous, de la théâtralisation de Ali Rai, du théâtre cérémonial de Abdelkrim Berrachid, etc.
Avec la mondialisation, les déplacements dans les espaces qui deviennent de plus en plus faciles et la révolution numérique qu’a connue le monde ses dernières décennies, les arts du spectacle arabes, dont les acteurs sont désormais connectés au reste de la planète, toujours sous l’influence des théâtres occidentaux voire mondiaux, connaîtront les mêmes mutations que ceux-ci. Grâce à de nouvelles formes de représentation ou de spectacle, installation, performance…de nouvelles esthétiques émergèrent dans la scène théâtrale arabe dont l’un des caractéristiques essentielles est l’hybridité. Aujourd’hui une grande majorité des spectacles donnés sur les scènes arabes sont des œuvres postmodernes dans lesquelles plusieurs langages, aussi bien scéniques que relevant d’autres formes artistiques, fusionnent et se côtoient. De nouveaux styles d’écriture ont émergé ont émergé aussi dont les auteurs traitent de nouvelles thématiques et expriment autrement leurs préoccupations très actuelles. La Pandémie qui a frappé dernièrement l’ensemble de l’humanité a eu des répercussions notables sur nos modes de vie et nos façons de faire. Comme pour l’ensemble des secteurs culturels les arts du spectacle ont été durement impacté par les restrictions imposées par les différents gouvernements. Devant la fermeture des salles de spectacle, l’impossibilité de se déplacer et d’aller à la rencontre des spectateurs et des autres artistes et professionnels, les créateurs ont été obligé d’inventer de nouvelles manières de faire et de continuer à créer en s’appropriant et utilisant les nouveaux outils qu’offraient les technologies numériques. De nouvelles pratiques sont nées modifiant ainsi sensiblement la nature même du produit culturel proposé.
Lors de ce colloque seront mis en perspectives et discuter les transformations les plus importantes qu’ont connues les arts spectaculaires arabes que ce soit dans le monde arabe ou en Occident. C’est un état des lieux des arts spectaculaires arabes aujourd’hui que nous aimerons dresser et discuter.
Voici les axes proposés :
- Rappel historique : évolutions et transformations qu’ont connu les arts du spectacles arabes
- État des lieux de la scène théâtrale maghrébine aujourd’hui
- État des lieux de la scène théâtrale arabe orientale aujourd’hui
- État des lieux des pratiques théâtrales et spectaculaires arabes en Occident aujourd’hui
- État des lieux de la critique, la recherche scientifique, l’enseignement et l’édition théâtrales dans le monde arabe aujourd’hui
Comité scientifique :
Omar Fertat (Bordeaux Montaigne)
Pierre Katuszewski (Bordeaux Montaigne)
Mounira Chatti (Bordeaux Montaigne)
Touriya –Filli-Tullon (Lumières 2, Lyon)
Laurence Denooz (Université de Lorraine)
Monica Ruocco (Université l’Orientale, Naples, Italie)
Angela Daiana Langone (Université de Cagliari, Italie)
Abdelhai Sadiq (Université Qadi Ayyad , Marrakech, Maroc)
Zohra Makkach (Université Ibn Zohr, Agadir, Maroc)
Pauline Denizo (Univ. Paris Ouest-Nanterre)
Marjorie Bertin (Univ. Sorbonne Nouvelle)
Majid Zouine (Université Mohamed V, Rabat, Maroc)
Mohamed Sef (Dramaturge, critique, Paris)
Driss Ksikes (Dramaturge, directeur de recherches, HEM, Rabat)
Hadj Dahmane (Université de Haute-Alsace)
Ahmed Cheniki (Université Annaba, Algérie)
Organisateur :
Omar Fertat (Université Bordeaux Montaigne)